Mon premier Sténopé !

Après 10 ans sans mettre les mains dans la chimie photo, j’ai eu l’envie d’un retour aux bases ; du grain d’argent en noir et blanc, un labo dans ma baignoire, un retour a l’enfance … En tout cas à la mienne. C’est grâce à une invention simple que cela a été possible, un adaptateur pour cuve paterson qui donne la liberté de développer facilement et n’importe où du format 4×5, le MOD54 disponible sur http://www.mod54.com/
La photographie numérique nous impose la culture de la maîtrise, de la « virtuosité » de la prise de vue à la poste production tout doit être contrôlé, parfaitement exécuté. (Note : je ne parle pas pour tout le monde, loin de là ! aujourd’hui, pour la plupart, c’est « fait n’importe quoi en Raw et photoshop fera le reste »
)
Je voulais un peu de lâcher prise dans cette histoire, me forcer à retrouver de l’innocence dans mon geste, de l’inquiétude dans l’attente. Comment faire ? Revenir au film 24×36 avec un vieux boîtier reflex ? Non sûrement pas, ou est la perte de maîtrise avec une visée reflex et une cellule TTL que je connaissais à l’époque assez pour exposer des cartons d’Ekta ? Et puis je pense que l’argentique n’a plus rien a faire en petit format, mais ça, je m’expliquerais sans doute dans un post à part entière.
Au bout de la réflexion est venu une évidence un protocole, ce sera grâce au MOD54 du grand format 4×5, mais pas une chambre, toujours le même problème avec la maîtrise qui est parfaite avec une 4×5 moderne. C’est là que sont revenus des souvenirs d’un appareil à écrire avec de la lumière que j’ai souvent voulu explorer sans jamais en prendre le temps : le STÉNOPÉ !Matériel rudimentaire, le sténopé est une vulgaire boîte avec un trou, pas de viseur, pas d’obturateur, pas d’électronique ! Nickel du lâcher prise en boîte. Mais comme si cela ne suffisait pas j’ai aussi décidé d’encadrer mon acte photographique avec une règle simple ; un point de vue = un négatif et jamais plus de 3 châssis double pour une journée pour ne faire qu’une cuve de développement. Ainsi plus possible de faire le choix de la facilité, il faut observer pour économiser, réfléchir puis estimer et croiser les doigts, développer, et enfin savoir !
Une fois ces principes posés, il me restait un détail à régler, ce fameux appareil comment faire ? Tomber dans le côté arte povera avec une boîte de conserve, un œuf ou de façon plus classique une boîte a chaussure ? Non j’ai besoin d’avoir au moins la certitude que si une image est gâchée, ce n’est pas à cause du matériel ! Un sténopé fabriqué par un artisan ? Pourquoi pas mais là, un cas de conscience, les tarifs varient pour des produits très semblables de 450 euros pour les artisans français à 90 pour des fabrications d’Europe de l’est à 150 euros pour de très beaux produits chinois !Finalement puisque c’est un boîtier en bois qui me faisait de l’œil pourquoi ne pas le faire ? Avoir cette démarche de l’artisan qui va concevoir et réaliser ses outils. Pourquoi un photographe devrait fatalement se tourner vers les autres pour pouvoir travailler ? En tout cas pas dans cette photographie ou tout est simplicité.
En cours d’élaboration de ma « boiboite », j’ai fait la découverte d’un site internet consacré au sténopé. Mon angoisse principale, ma galère annoncée, obtenir un « trou de qualité », s’est d’un coup simplifiée ! C’est http://www.stenocamera.fr/ qui m’a fourni mon « optique », un trou de 0,32 mm dans une feuille de laiton de 0.025mm d’épaisseur avec une finition soignée. D’ailleurs Thierry Gonidec, AKA monsieur sténocamera, a aussi tourné mes écrous de fixation trépied au pas kodak. Je le recommande parce que son matériel et nickel, c’est un homme sympathique et disponible, bref un artisan qui aime ce qu’il fait !
Pour le bois j’ai décidé de construire en contre-plaqué aviation que l’on trouve en boutique de modèle réduit. Ce bois est plus rigide que le contre-plaqué classique ce qui permet d’utiliser des planches plus fines. Il est facile à travailler. Niveau outillage je suis parti la fleur au fusil avec une perceuse hors d’âge, une scie sauteuse au patin tordu, deux scies à main, deux serts joints et pas mal d’huile de coude.
Une fois les pièces du puzzle réunies, j’ai réalisé ma boîte en dilettante en une semaine, j’aime prendre du temps pour bricoler en réfléchissant entre deux phases. C’est une des astuces pour faire à coup sûr, bricoler doucement mais réfléchir beaucoup ! Ma fabrication est simple deux cadres en baguette de 10 mm. Un cadre supporte le châssis double de type fidelity 4×5, l’autre tient le panneau ou est installé « l’optique » et « l’obturateur ». Sur les côtés des panneaux de contre-plaqué aviation de 6 mm assurent l’étanchéité à la lumière et supportent les écrous de montages du trépied et les écrous qui servent au système « presse film ». Pour maintenir les châssis en place rien de plus simple que deux élastiques de merceries !
Voilà comment j’ai découvert et pris du plaisir avec faire des images simple avec un appareil réduit à sa plus simple expression. Comme vous pourrez le voir sur mes images je ne suis pas très doué pour appliquer un pauvre vernis, ce sera la prochaine étape apprendre à peindre du bois ! Pour ce qui est des résultats, ce sera pour un prochain post.